samedi 28 mai 2022

Flâneries littéraires

 




            Je viens d’achever la lecture d’un charmant opuscule : Éloge des librairies de Maël RENOUARD (Editions Rivages poche) La photo de couverture et le titre m’avaient d’emblée séduite. L’auteur évoque ses années de lycéen et d’étudiant au rythme de ses découvertes littéraires dans les librairies ou chez les bouquinistes.  Il nous invite à une flânerie géographique – Rennes, Nantes, quartier latin à Paris, Trouville, Marseille, Lisbonne, Londres – au cours de laquelle les lieux d’autrefois éveillent sa nostalgie, ravivent ses coups de cœur, sa curiosité et sa soif de lectures. D’anecdotes en portraits de libraires esquissés, de décors plantés, Maël Renouard nous fait complice de ses achats et de ses années qui ont forgé en lui le goût des lettres et une culture littéraire dense et substantielle. Il se penche sur sa silhouette d’adolescent campé devant les livres avec tendresse. Il évoque avec humour le dilemme du lecteur vorace submergé par les livres sur son lieu de vacances : « Je ne dois pas être seul familier de cette expérience : au moment de partir en vacances, l’été, on bourre ses valises de livres qu’on se promet de lire au soleil, dont on sait déjà, sans trop se l’avouer, que le nombre excède ce qu’on sera concrètement capable d’achever (mais, se dit-on, c’est aussi pour se ménager la possibilité de choisir), et puis, arrivé sur son lieu de villégiature, on visite un libraire ou bouquiniste du pays, et voici que l’on découvre un nouveau livre, gros ou très gros, que l’on n’avait jamais vraiment songé à se procurer avant de tomber dessus ainsi au hasard d’une flânerie, mais que l’on va prendre, et que l’on va passer toutes les vacances à dévorer, au détriment de la lourde cargaison que l’on avait emportée et qui se trouve frappée d’inutilité avec une soudaineté presque comique. » (page 95)

            Son histoire personnelle de jeune lecteur, circonscrite dans le temps et l’espace, met l’accent sur la pérennité du commerce des livres, les bouquinistes des quais de Seine, par exemple. Ou sur leur impermanence ; des pas de porte ferment définitivement ou changent d’adresse et c’est tout un pan d’une vie de lecteur-acheteur qui disparaît. Ne restent alors que les livres, dans la bibliothèque, et le souvenir des circonstances de l’achat. « D’un grand nombre de mes livres, je peux dire, bien des années après, dans quelle librairie, je me les suis procurés […] » (page 7)


samedi 21 mai 2022

Ecrire un nouveau livre

 

 



            Lors des rencontres dédicaces, on me demande parfois si j’ai un nouveau livre en cours. Réponse affirmative. Une énergie et une imagination intarissables ? Une part de graphomanie ? Ni l’un ni l’autre. Entre l’envoi d’un manuscrit à un éditeur et la publication effective, il s’écoule du temps. Dix-huit mois. Parfois davantage. Ce qui fait qu’un nouveau livre est souvent déjà en cours lorsque le précédent paraît. Il avance à petits pas, parfois bousculé par les heures dévolues à la promotion de son aîné. Il se tapit dans un coin du cerveau, se déploie en images à toute heure de la journée. Une idée pour un chapitre peut s’ébaucher au volant de la voiture, sur l’oreiller avant le sommeil, sur un chemin de balade à la campagne.

            On écrit comme on jardine. Parfois des semis sur un carnet : on laisse lever, on aère, on replante. Ou des graines jetées en pleine page sur l’écran.   Le livre s’étoffe avec les saisons. On le néglige, faute de temps. Puis on le bichonne. On s’agace d’un paragraphe ou d’une note portée au carnet, avec le temps les mots ont ranci ou fané. Alors on jette. Les déchets d’écriture sont sans danger pour la planète. Parfois, ils font même du bon compost. Nos plantations se nourrissent aussi de l’air du temps. On pioche ci et là, sciemment ou pas, dans l’engrais du quotidien. Une image, un mot entendu ou lu, un écho entre les choses, une émotion qui nous étreint. Notre lopin, feuille de papier ou écran d’ordinateur, nous assigne à l’effort répété. Mal au dos, crampe de l’épaule, cerveau en compote. L’écriture est un labeur. Notre livre et nous formons un ménage à deux particulier. Le bouquin en cours est un compagnon de route des bons et des mauvais jours. Il nous hante, nous émeut, nous afflige, nous enorgueillit, nous exalte, nous agace. Il raisonne en nombre de signes, en pages écrites. Comptes d’apothicaire à peu de frais mais si nécessaires à l’équilibre de l’intrigue.

            Écrire est exclusif, égoïste parce que c'est une activité solitaire et chronophage. Écrire est une folie : on s’enferme dans un monde parallèle, on se fait le parent ou l’amant de nos personnages. On les garde pour soi puisqu’ils avancent avec nous, souvent à l’insu de notre entourage. On se coupe du réel pour constituer une fiction avec sa réalité interne. Schizophrène, on vit une autre époque au cœur même de l’année en cours. C’est la guerre 39-45 ou la grande peste noire en plein 21ème siècle. On saute d’un paragraphe à peaufiner à un déjeuner à cuisiner. Aux yeux de nos proches, on est illuminé, halluciné, retranché, inquiet, impénétrable. Écrire, ça remplit une heure, un jour, une vie.


mercredi 11 mai 2022

Vieilles demoiselles

 




    

                                    Parfois les murs sont de vieilles demoiselles

                            Qui sentent un peu la naphtaline

                            Et ont une bonhomie rugueuse.

                                                                                             8 mai 2022

                                       

            

                               

vendredi 6 mai 2022

A tire d'aile

 

 

                                                                 Source Internet


Origami

 

                               Plier sa tristesse en origami

                               Cacher sa mélancolie

                               Dans le vert tendre du papier

                               Avec les doigts de la volonté

                              Composer une silhouette d’oiseau

                              Et la laisser s’envoler à l’écho

                              De notre vague à l’âme

                              Vague à l’air

                              Vague à l’eau

                              Vogue vole        oiseau

                              La tristesse se fait la belle

                              Dans les plis et replis

                              À tire d’aile

                              Origami

 

Décembre 2019








vendredi 29 avril 2022

 


Amandine Albisson, danseuse étoile de l'Opéra de Paris. Source Internet


        J’ai entendu ce matin à la radio que c’est aujourd’hui la journée de la danse. J’ignorais qu’il existait une journée de la danse. Quel bonheur d’apprendre qu’on rend hommage à Terpsichore ! La danse n’est pas aussi vieille que l’humanité mais on peut penser que nos lointains ancêtres ont un jour esquissé quelques pas, fait onduler leurs bras. Si l’art pariétal nous est parvenu, nulle trace du corps en mouvement. Il faut attendre l’antiquité avec les statuettes et les bas-reliefs.

            En cette journée de la danse, ayons une pensée émue pour toutes les danses, aux quatre coins du monde : les arabesques et pirouettes des danseurs classiques, le tango, le hip hop des gamins des rues newyorkaises, les danses rituelles de l’Afrique noire, les spirales des derviches tourneurs, la samba, la valse viennoise, le dabkeh au Liban, la séguedille, le fandango et le flamenco espagnols, la bourrée auvergnate, la gigue écossaise, la csárdás hongroise, la gavotte, le menuet, la pavane, le rigaudon, le trepak russe, la tarentelle. Impossible de nommer toutes les danses du monde. Leur variété donne le tournis !

 

Danse traditionnelle coréenne Source Internet
                      

 

            « Elle semble d’abord, de ses pas pleins d’esprit, effacer de la terre toute fatigue et toute sottise. […] Qu’ils sont habiles, qu’ils sont vifs, ces purs ouvriers ! Ces deux pieds babillent entre eux, et se querellent comme des colombes. Le même point du sol les fait se disputer comme pour un grain. Ils s’emportent ensemble, et se choquent dans l’air, encore. A droite, à gauche ; en avant, en arrière, et vers le haut et vers le bas, elle semble offrir des présents, des parfums, de l’encens, des baisers, et sa vie elle-même, à tous les points de la sphère, et aux pôles de l’univers. Elle trace des roses, des entrelacs, des étoiles de mouvement, et de magiques enceintes. Elle bondit hors des cercles à peine fermés. Elle bondit et court après des fantômes. Elle cueille une fleur qui n’est aussitôt qu’un sourire. »

Paul VALÉRY L’âme et la danse, NRF 1921

 

Léonore Baulac, danseuse étoile de l'Opéra de Paris, source Internet
                            

                            Germain Louvet, danseur étoile de l'Opéra de Paris dans le ballet Casse-                                Noisette, source Internet


 


jeudi 28 avril 2022

La création

 


    




La création

 

Sinueuse et indomptable

Elle repousse

Les plaques tectoniques de notre conscience

 

Elle gronde    sourd     et jaillit

Magma de mots et d’images

Ardente lactescence

 

Feu de Bengale

Millefiori

Kaléidoscope

 

Elle fume     file     s’effiloche

Dans la tréfilerie de notre âme et des forces vives

Lucie fileuse

 

Lampe en papier de riz

Elle promène ses hésitations

Tombe comme une lune

Dans le sillage de l’onde

 

Cueillie par la canne du souffleur

Elle rougeoie tournoie

Feu de verre oblong

Priapisme ambré

 

Au lucernaire

De la vigile

Elle défile    feu follet

 

Elle vacille

Filament    funambule

De nos envies

 

Forge de Vulcain

Elle cisèle le bouclier de notre muse

D’achillées jaune d’or

 

Babel débridée

Elle fuse

                     explose

                                      en constellations

 

 

   mars 2020

                      

 

 


 

Archives

Conférence

Mes consultations