Samedi
soir, ce long week-end s’achève déjà presque et je n’ai rien écrit dans mon
blog. Indolence et scrupules se livrent un combat inégal. Nulle nécessité,
c’est vrai. J’ouvre la porte de la datcha selon mon bon plaisir. Avec cette
arrière-pensée de ne pas être une hôtesse soucieuse de ses visiteurs. Des
lecteurs en attente, sans doute. Quoi dire ? Que vais-je m’autoriser à
écrire cette fois encore ? Je n’ai pas toujours d’idées. Écrire juste.
Écrire sans futilité. Écrire sans sombrer dans la graphomanie. Écrire sans être
la greffière de sa propre vie comme certains s’en sont donné la tâche (et s’en
acquittent fort bien ou avec prétention et complaisance). Les mots, les thèmes
infusent en moi. Se perdent dans le tourbillon des jours. Je reviens, ce soir,
à ma sempiternelle tisane, ressassée, refroidie, sur la difficulté, souvent,
d’écrire malgré ce bouillonnement en moi, un adage auquel je suis fidèle, un
élan vital sans lequel je m’étiolerais. Écrire, un de mes verbes préférés.
Vingt
et une heures au jardin. Première douceur de la saison. Le seringa me lance par
intermittences ses effluves. Un merle chante au sommet d’une cheminée. C’est
sans doute celui qui m’a élue au point de courir vers moi en sautillant dans la
pelouse lorsque je viens au jardin et qui ne me fuit pas quand ma silhouette se
découpe dans la fenêtre. Il quête les morceaux de pomme que je lui donne. Sa sérénade, ce soir, ne couvre pas le
bourdonnement d’une foire, non loin dans mon quartier, et les exhortations du
forain qui troublent mon jardin tranquille de cette fièvre populaire dont je
n’ai jamais partagé l’engouement.
Dans
le ciel surgissent les premiers martinets de la saison, prévisibles hérauts
d’une chaude soirée. Leurs ailes déployées, leurs virevoltes sont des
oriflammes. Et soudain le ciel se quadrille de traînées de fumées d’avion,
nacrées par le soleil couchant. Cinq vols. Cinq destinations. Lignes parallèles ou
croisées en un carroyage inattendu. Je cours chercher l’appareil photo. Trop
tard. Il aura suffi de quelques instants à peine pour que s’estompent les
tracés, pour que les avions ne soient plus qu’un point ténu là-haut. Fugacité
insaisissable dans l’appareil photo.
Il
en va des lignes d’horizon de ces avions comme des mots fuyants, dans un esprit
pas assez arrimé au papier. Ciel bleu et feuille blanche forment un même
mirage.
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