dimanche 29 août 2021

Salons du livre 1/2


(Salon du livre Le Mans 2010)
 


                Du printemps à l’automne, les salons du livre foisonnent. Lectrice boulimique, j’ai, avant d’être publiée, arpenté maintes fois leurs allées. Y être invitée en tant qu’auteur, c’est une expérience toute autre. Les premières fois, on se sent grisé, notre ego joue au yoyo, on tremble un peu quand on fait sa première dédicace, on coche sur un petit carnet un bâton par livre vendu, on balbutie un argumentaire maladroit au flâneur qui vous écoute poliment, on apprend à attendre, on a trop chaud ou trop froid, on se promène devant les stands avec son badge « auteur », on côtoie discrètement des écrivains connus, on croque des petits fours avec le staff et des élus, on rougit d’un compliment, on serre les dents quand une visiteuse dédaigne vos ouvrages et vous abreuve d’un : « Moi, je viens pour les vrais écrivains ! »

                Sitôt la publication de mon premier livre, Les Souvenirs n’encombrent pas les placards, en 2010, j’ai pu, grâce au dynamisme de mon éditeur, participer à plusieurs salons, grands ou petits.  Notamment Bruxelles, Le Mans, Bordeaux. Je me souviens d’un voisin de stand, auteur octogénaire, publié par une maison d’éditions du sud-ouest. Il avait le discours bien rôdé, un bagout attachant et raflait les signatures. « Vous savez, les livres ça se vend comme des cravates ! » me confia-t-il. Il avait à peine refermé son stylo qu’un lecteur potentiel approchait. Véritable Zébulon, il sautait de sa chaise, se hissait d’une main au piquet soutenant le panneau du stand et débitait son laïus. Comme s’il tirait les cartes : trèfle pour tel roman, as de pique pour un autre. En quelques envolées lyriques, on naviguait en haute mer ou on rejoignait une ferme périgourdine. Et cela s’achevait en apothéose par un voyage au long cours ou des amours campagnardes dûment dédicacés. Le salon du livre de Bordeaux avait été pour moi un festival de joies. Ventes plus qu’honorables, soleil, fontaines à vin sur le site, réception raffinée et accueil bienveillant d’Alain Juppé.

                Au Mans, je me souviens de conversations touchantes avec des visiteurs et d’un dîner aux couleurs du Mexique, pays invité d’honneur. À Bondues, d’un déjeuner concocté par l’école hôtelière du Touquet. Plaisir de lire, plaisir de la rencontre, plaisir de la bonne chère. Alexandre Dumas disait d’ailleurs que les hommes de lettres « habitués à toutes les délicatesses, […] savent apprécier mieux que personne celles de la table. » Mais que ces anecdotes ne cachent pas des réalités plus ordinaires : entre deux signatures, les écrivains – quand ils n’ont pas de notoriété – avalent souvent un sandwich devant leurs piles de livres.

mardi 24 août 2021

Les premiers mots

 



            Depuis que je sais lire, je pèlerine avec les mots et les images. Des pages de mon premier livre de lecture, Daniel et Valérie, à mes innombrables lectures d’adulte, en passant par Gribouille, Camille et Madeleine, Alice, Joli Cœur et Tom Sawyer, héros de la Bibliothèque rose ou verte, j’ai toujours vécu avec les mots. Mots des livres avec lesquels j’ai rêvé. Ou mots avec lesquels j’ai joué, que j’ai glissés dans des cahiers ou vaillamment tapés à la machine pour écrire des histoires qui habitaient ma tête d’écolière, de collégienne puis de lycéenne. Des mots et des lignes auxquels je me suis colletée, année après année. Passion indéfectible, contre vents et marées de refus d’éditeurs. Passion attisée par une touchante lettre d’encouragement, manuscrite, d’une directrice d’un comité de lecture à l’apprentie que j’étais encore à dix-huit ans.  

            Dès l’enfance, mes mages ont été les écrivains. À onze ans, je me constituai une anthologie d’auteurs en recopiant, par ordre alphabétique, leur biographie et je découpai dans les magazines des articles sur les écrivains. Les enjambées de Bernard Clavel dans la campagne irlandaise et le bureau de Maurice Genevoix face à la Loire m’ont fait fantasmer. Quand je serai grande, je serai écrivain ! assénais-je à mes proches de ma candide voix d’enfant. C’était une époque où l’on ne se faisait guère un nœud au cerveau pour féminiser la fonction. Auteur, écrivain, mots savourés et grade mérité. Auteur, écrivain, je suis devenue et le resterai. Pas d’auteure ni d’autrice dans ma bio. Pas d’écrivaine, vain combat, vaine vanité.

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