Résurrection; élément de retable. Albâtre polychrome, 15ème siècle.
À la Prévert ou en version patchwork, quelques touches de la
semaine écoulée. Au gré des joies et des morosités. Les muscaris foisonnent
dans le jardin et les jacinthes sauvages commencent à éclore. C’est un jardin
bleu. Mes poétesses en herbe du club poésie, au collège, ont levé le nez dans
les nuages ; en vers, avec ou sans rimes, elles ont rassemblé les nuages
qui font venir la pluie. Nuages acrobates, royaux, à l’envers, malchanceux ou
bienheureux… car la poésie pose du beau sur nos noirceurs, de la fantaisie sur
nos angoisses. L’eau, source de vie, est si belle dans la jarre de la Samaritaine
au puits. Mais bien laide quand elle fait l’objet de spéculations, quand elle
est un dû pour les insouciants du monde ou quand elle est prétexte à des
violences déconnectées de toute humanité. Alors, faut-il, parfois, couper le
robinet parce que les remous du vaste monde nous enlisent dans un marais
putride ? Où trouver l’équilibre entre désintérêt égoïste,
indifférence, désaveu et lucidité, indulgence, empathie ? Nous sommes si
souvent de bien piètres citoyens et n’avons pas ou plus l’intelligence, le
courage et l’audace d’une Sévérine (1855 – 1929), femme de lettres, journaliste
et féministe, que j’ai découverte cette semaine par le biais d’une brillante
conférence donnée à l’Université de Picardie Jules Verne.
Quand
l’âme souffre trop des blessures du monde, la maison, la datcha, le foyer, le home
sweet home, sont-ils les seuls paravents sur nos peines ? Le paravent
cache la misère et l’indigne mais n’efface pas ce qu’il soustrait. Il nous faut
donc sortir de nos carapaces. S’engager. Si les combats syndicaux s’essoufflent,
ont leurs limites, ou parfois leurs dévoiements, où se tourner ? En cette
semaine Sainte, posons les armes de nos aigreurs, les boucliers de nos
inquiétudes et tournons-nous vers l'Espérance. Mardi soir, lors de la messe
chrismale, la cathédrale d’Amiens était pleine à craquer – et il y avait beaucoup
de jeunes, d’étudiants ! – ; ce soir, le Feu nouveau sera allumé sur
les parvis des églises pour la veillée pascale et les chrétiens se
transmettront ces petites flammes en une procession de cierges. Et l’on lira ce
texte du prophète Isaïe que j’aime tant :
De même que la pluie et la neige
descendent des cieux
et n’y retournent pas sans avoir
arrosé la terre,
sans l’avoir fécondée et l’avoir fait
germer
pour fournir la semence au semeur et
le pain à manger,
ainsi en est-il de la parole qui sort
de ma bouche,
elle ne revient pas vers moi sans
effet,
sans avoir accompli ce que j’ai voulu
et réalisé l’objet de sa mission[1].
Et que ceux qui ne mangent pas de
pain-là ou ont une autre religion trouvent la paix dans leur cœur et un espoir
pour le monde dans la poésie, dans l’amitié, dans les écrits qui les nourrissent.
J'aime énormément ce passage du prophète Isaïe aussi. Belle aussi, ta conclusion ! Laure F.
RépondreSupprimerMerci Laure. Ravie de savoir que tu pousses la porte de ma datcha.
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