Angelo
musicante
Douces notes
de sérénité
Un Enfant
nous est né
Pour que
vienne la Paix
Joyeux Noël
Angelo
musicante
Douces notes
de sérénité
Un Enfant
nous est né
Pour que
vienne la Paix
Joyeux Noël
L’enfance
remonte comme un vieil hiver
Les neiges
d’antan existent-elles ?
On cherche
des hivers de cartes de vœux
Une chimère
L’enfant a
habité en songe ces villages enneigés
Pour la
lumière aux fenêtres des chaumières
Pour la
promesse d’Espérance de ces églises qui invitent à Noël
Pour le
chant du rouge-gorge au coin de la carte
[…]
Parfois
l’hiver brode des fleurs de givre
Rideaux de
dentelle éphémères
Qu’on
n’ouvre pas
L’enfant l’a
appris à ses dépens du bout des doigts
L’Engrangeoir
Nathalie
Boniface-Mercier, Éditions La Chouette imprévue (2021),
pages 22, 23 et 56
Avec
le temps de l’Avent, les illuminations de noël sont revenues dans nos villes et
villages, plus ou moins fastueuses, faisant fi des injonctions à la sobriété
énergétique. J’aime à les revoir chaque année mais cette débauche de lumières,
de cette surenchère d’éclairages m’agace aussi quelque peu. Loin, in fine, du
véritable message de noël. Il y a quelques jours, alors que j’arpentais une rue
illuminée, une image totalement décalée s’est glissée dans mon esprit. J’ai
revu la couverture d’un livre sur l’Himalaya[1]
que m’avait offert autrefois une amie pour mon anniversaire. Une photographie
unique, prodigieuse. Une ode à la lumière, somptueuse et poétique, avec
laquelle aucune guirlande de nos riches pays occidentaux ne pourrait rivaliser.
Les yeux de nos enfants gâtés n’auront jamais l’émerveillement de Pangdjé, une
Népalaise de dix ans, qui s’enthousiasmait, un jour d’hiver 1978, des reflets
du soleil sur un morceau de glace qu’elle avait brisé dans une flaque d’eau
gelée. Le photographe, Éric Valli, a su saisir
l’instantanéité de cette joie enfantine, humble et grandiose à la fois. Et la
qualité du cliché nous donne à voir la lumière réfractée sur le petit bout de
glace tandis qu’une auréole nimbe la tête échevelée de l’enfant. Sans entrer
dans un raisonnement binaire et inévitablement réducteur, je ne peux m’empêcher
de songer au foisonnement assez vain de nos richesses occidentales au regard du
modeste jeu de cette fillette au Népal. À contre-courant de nos noëls
mercantiles, de nos jeux sophistiqués, ne perdons pas la magie de la lumière
dans son plus simple habit et sachons l’honorer comme il se doit. Fiat lux.
[1] Himalaya
Photographies d’Éric Valli, texte de Anne de Sales, Éditions de La Martinière, 2001 et réédité en 2010
Pâtisserie Meert Lille Source: Internet
Il
y a peu, la boucherie – charcuterie de mon quartier fermait définitivement.
Départ en retraite. Le magasin ne sera pas repris. J’ai franchi pour la
dernière fois le seuil de ce magasin de quartier avec un pincement au cœur. Les
petits commerces disparaissent. Et avec eux toute une tradition de familière
bonhomie dans les relations humaines. Des savoir-faire aussi. Mais ce n'est pas
tout. Un patrimoine citadin ou rural s’efface. Des objets, des couleurs, des
décors, parfois kitch ou retro mais qui traduisaient un je ne sais quoi de french
touch dont certains Américains sont si friands chez nous. Ces belles
façades en marbre noir ornementées de têtes de vaches. Ces guirlandes de roses
en céramique sur les murs ou en plastique entre les raviers en porcelaine à
liseré fleuri. Chez mon boucher, c’était une frise de roses stylisées, art
déco, qui courait sur le carrelage de la muraille. La lumière jaune cru des
néons me rappelait des ambiances de cuisines, l’hiver, dans les maisons des
années soixante-dix. Je n’ose penser au saccage à venir de ces carreaux de
faïence sous les coups de burin quand le local sera transformé en immeuble de
rapport. Et je revois encore le décor Belle Epoque de la boulangerie-pâtisserie
à deux pas de chez moi, avalé par les réfections des propriétaires successifs.
Les boiseries beiges aux volutes de fleurs rose tyrien, bleu ciel et vert
amande ont été placardées d’un mauvais lambris gris et blanc pour donner à la
boutique une allure d’ersatz de starbuck coffee incongru et triste. Puis,
l’artisan ayant fait faillite, la boutique fut l’objet d’un nouveau massacre.
Mur de fausses briques couleur sienne en vis-à-vis de murs bleu outremer. La
façade seule garderait un soupçon de son antique noblesse avec ses panneaux et
sa devanture de bois, n’était la lasure teintée cire d’abeille qui a eu raison
du vieux rose délavé d’antan et qui s’est trouvée un jour affublée d’un B incongru,
peint à la main pour escamoter le P de pétrine parce qu’un concurrent
quelque quatre cent mètres plus bas a planté sa boutique, énième clone d’une
chaîne de magasins bien connue et qu’il n’est point nécessaire de nommer
ici.
La
semaine dernière, l’association Ecrivains des Hauts-de-France se réunissait
dans un des salons de la célèbre pâtisserie Meert, à Lille. Si la maison doit
sa renommée à sa gaufre fourrée d’une ganache à la vanille de Madagascar, elle
la doit tout autant à la magnificence des lieux. La boutique, née en 1607, fut
d’abord celle d’une dynastie d’apothicaires-épiciers, qui, en 1677, put
développer son activité en boulangerie-pâtisserie. L’endroit est un délice pour
les yeux. Le seul magasin, j’aime à dire en plaisantant, où l’on se réjouit de
faire la queue avant d’être servi ! Une plongée en plein XVIIIème
siècle dans un étonnant décor pompéien et orientaliste, à une époque où l’on
s’extasiait de découvrir le thé, le café et le chocolat. Ces breuvages et
délicatesses du palais arrivaient d’Orient ou du Nouveau Monde sur des
caravelles. Le magasin se dota alors d’un salon de thé, dans le style Louis
XVI, puis d’un deuxième salon, dans les années 1930. Aujourd’hui, plus que
jamais, on pousse la porte de la maison Meert autant pour la joie de voyager
dans le temps que celle de déguster leurs pâtisseries. Et la beauté des lieux
n’a rien à envier à celle des célèbres cafés viennois. L’atmosphère, toute en
nuances, y est toutefois différente. À chacun son Histoire et ses illustres
fantômes.
Source: Internet
Le monde des lettres a perdu, vendredi 25 novembre, un
merveilleux poète, Christian Bobin. C’était un homme d’une belle générosité,
d’une simplicité sincère et qui savait goûter les petits bonheurs du quotidien
et nous les offrir à travers ses mots, dans de charmants récits ou poèmes en
prose. J’aurais pu noter ici quelques passages de ses livres. Mais il suffit de
lire tous les hommages qui lui sont rendus dans la presse et sur internet. La
langue de Christian Bobin était chatoyante et poétique même lorsqu’il parlait.
Si belle qu’un jour j’ai noté à la volée ces quelques mots de lui, tâchant de
retranscrire le plus fidèlement possible ses propos, entendus dans une émission
télévisée. Et j’ai accroché ce papier dans ma cuisine. L’encre a passé mais la
vertu de ses mots est intacte.
« Les livres agissent même quand
ils sont fermés. Quand il est fermé, le livre est comme le visage d’un ami. Sa
présence va vous éclairer… Le livre fermé près de vous est aussi apaisant qu’un
chat… C’est un plaisir à venir. »
Christian Bobin dans La Grande
librairie, le 13 février 2014.
Hier, j’ai commencé à lire Mille chemins ouverts de
Julien Green, paru aux éditions Grasset en 1964, lequel me vient de la
bibliothèque du père d’une amie. La plupart des ouvrages, à l’époque, étaient
vendus sans pages découpées. Monté avec des feuilles in-quarto, le livre n’offrait
pas d’emblée tous ses secrets. Pour pouvoir le feuilleter, il fallait s’équiper
d’un coupe-papier, glisser la pointe de la lame dans la fente des pages
géminées de la tranche de queue puis remonter de bas en haut pour trancher les
feuillets de la gouttière avant d’attaquer la tranche de tête. Un peu technique mais avec de l’adresse et de
la patience, les pages s’ouvraient une à une. La lecture d’un livre se
méritait ! Les lecteurs avaient-ils la patience de découper toutes les
pages au préalable ?
Peu
de maisons d’éditions pratiquent encore la reliure in-quarto. Je me souviens du
premier livre non découpé que j’ai acheté : D’île et de mémoire de
Claude Louis-Combet aux éditions José Corti. C’était il y a plus de quinze ans,
à Uzès. Je suis restée des années sans ouvrir le livre, ne serait-ce que pour
en garder la magie. Peut-être aussi, inconsciemment, la peur de rater la
découpe ! Depuis, j’ai eu en ma possession de charmants opuscules de Joël
Vernet, dans la collection entre 4 yeux aux éditions des Belles-Lettres. Le
papier, épais, garde des effilochures le long de la gouttière et de la tranche
supérieure. Cela a un aspect artisanal bien sympathique. Je serai en revanche
bien en peine d’identifier le papier employé.
Alors
que la matière papier devient de plus en plus chère, des éditeurs de poésie,
bien souvent, font encore le choix de privilégier un papier de qualité, voire
rare. Mais, désormais, les romans sont imprimés sans tirés à part, comme exemplaires
de bibliophilie. Et j’en reviens à mon Mille Chemins ouverts de 1964. Le
père de mon ami, en acquérant ce livre, avait omis de trancher avec son
coupe-papier les deux premières pages, ce que je me suis empressée de faire,
mue par la curiosité d’en lire le contenu. Et c’est sans doute pourquoi j’ai
été plus particulièrement sensible à ces quelques lignes qu’on ne voit plus
guère dans les romans brochés. Il a été tiré de cet ouvrage, le
soixante-dixième de la nouvelle série des cahiers verts, mille sept cent
quatre-vingt-neuf exemplaires de luxe, à savoir : cinquante-sept
exemplaires sur vergé de hollande numérotés Hollande 1 à 40 et Hollande
I à XVII, cent soixante-sept exemplaires sur vélin pur fil I à XVII et mille
trois cent soixante-cinq exemplaires sur alpha mousse des papeteries navarre,
numérotées Alfa 1 à 1350, et Alfa mousse hors commerce réservés à la presse,
numérotés S.P 1 à S.P 200. L’ensemble de ces tirages constituant l’édition
originale. Fabuleux, non ! Les noms de papier font rêver. Quant au
vélin, je me pose cette question : s’agit-il du vélin tel qu’on
l’employait au Moyen-âge ? À savoir, des pages fabriquées dans la
peau d’un veau mort-né ? Sans doute pas. Le mot vélin recouvre aussi la
signification, plus moderne, d’un très beau papier. C’est plus probable. Eh
oui, vérification faite, tout est dans l’indice pur fil. Il s’agit bien
d’un papier très blanc, fabriqué dans une pâte à base de chiffon, de coton. Toujours
est-il que ce langage d’imprimeur et d’éditeur devient étrange à nos yeux.
Comme une sorte de message codé pour initiés ! Tout est subtil :
hollande sans majuscule ou avec. Chiffres arabes pour certains exemplaires,
chiffres romains pour les autres. Comprenne qui pourra. À moins que vous ne soyez un vrai bibliophile ?