Le
président Emmanuel Macron a fait de la lecture une grande cause nationale.
Initiative louable et qui s’est notamment concrétisée par les chèques culture
distribués aux adolescents. Mais les Français n’ont pas attendu leur président
pour semer la lecture en toutes saisons et en tous lieux. Des initiatives
privées ou institutionnelles sont pléthoriques dans notre hexagone. Lire à voix
haute des extraits de romans, des poèmes ou des nouvelles est une semaison
agréable, féconde et chaleureuse. Elle met les mots en bouche, les fait vivre. Elle
rassemble les hommes, elle colore un lieu anonyme ou impersonnel.
Chaque
mois de mars, depuis 1999, le Printemps des Poètes offre des lectures de
poésie à foison, à l’initiative de maisons d’éditions, de communes. Des
lecteurs anonymes ou professionnels, des comédiens, les auteurs eux-mêmes
lisent des vers dans des halls de gare, dans des théâtres, des hôpitaux, des
écoles. C’est dans le cadre du festival Rayon vers, éclos lors du Printemps
des Poètes cette année, que j’ai eu l’occasion de lire quelques pages de L’Engrangeoir
dans une résidence pour seniors avec un accompagnement musical. (Ce type
d’établissement propose des appartements en location à des personnes âgées et
autonomes qui bénéficient d’une vie sociale partagée et accompagnée. Une salle
de restauration, une chambre d’hôte pour la famille, une salle d’activités et
un personnel assure ces liens de vie commune.) Ce jour-là, avaient été conviés
également des résidents d’un foyer de vie. Ce fut un beau moment de
convivialité et d’émotions partagées.
La
lecture à voix haute essaime aussi bien sûr dans les bibliothèques. Une
pratique évidente aujourd’hui, mais qui ne l’a pas toujours été. On a longtemps
réservé la lecture orale à des bibliothécaires s’adressant aux enfants. Dans
notre moisson de lectures orales, nous pensons évidemment à la formidable
initiative de François Busnel avec son concours de lecture pour les collégiens
et lycéens Si on lisait à voix haute.
D’autres
projets sont devenus de sympathiques rencontres autour du livre. Créé par le
Conseil régional Centre- Val de Loire, les Mille lectures d’hiver
propose aux habitants de cette région d’inviter chez eux des voisins, des amis.
Le temps d’une veillée hivernale, un lecteur les emmène au gré des mots à la
découverte d’un auteur.
L’association
Duo en accord, en Picardie, propose des lectures musicales de poèmes,
nourries par une thématique, chez des particuliers, dans des maisons de
retraites, des salles des fêtes au profit d’associations caritatives. Au début
des années 2000, la Compagnie Paroles buissonnières, entraîne la
comédienne Marianne Cantacuzène sur les routes de France et d’Espagne, avec des
livres dans sa besace et même une bibliothèque tour de Babel itinérante. En
2005, orchestré par Marianne Cantacuzène et des comédiens de la région
d’Amiens, une centaine de lecteurs bénévoles lisent dans son intégralité, jour
et nuit, le temps d’un week-end, les milliers de vers de La légende des
siècles de Victor Hugo. Un souvenir inoubliable pour la lectrice et
l’auditrice que je fus dans cette aventure exceptionnelle, partagée avec
quelques collègues et amis.
Quand
la voix d’un lecteur est l’ambassadeur d’un écrivain connu ou inconnu, c’est la
grande famille de la littérature qui se déploie, les mots semés font des champs
moissonnés et du pain de joie à distribuer. Les mots relient les hommes,
dénouent les tensions, apaisent les cœurs blessés, les esprits inquiets,
ouvrent des horizons. Il m’est impossible de citer toutes les manifestations de
lectures à voix haute en France. Je ne les connais d’ailleurs pas toutes. Certaines
ne sont pas médiatisées ; locales, privées, modestes ou ambitieuses, elles
sont toutes un coin de pays de cocagne où les mots sont bons à croquer.
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