Je dégustais ces jours-ci ma pâtisserie préférée, une tartelette à la pâte sablée, garnie d’une fine couche de caramel au lait et recouverte d’une crème de pistache toute en légèreté et je songeai à l’idée de renommée. Je préfère au mot célébrité celui de renommée, un brin désuet et plus discret. Le pâtissier de mon quartier, très talentueux, n’a point cette renommée accordée à ses illustres confrères parisiens, célèbres, l’un pour son fabuleux gâteau Ispahan, l’autre pour son original Equinoxe. Je ne les ai point nommés mais les gourmands les auront reconnus. Et pourtant la Soucoupe à la pistache de mon quartier ne démérite pas par son aspect, en saveur et en texture. Les voies de la renommée sont multiples. La célébrité, née sur un terrain propice, est souvent construite de toutes pièces, entretenue, rarement complètement fortuite. Le bouche-à-oreille ne suffit pas.
La
célébrissime Sacher Torte a bâti sa réputation dans le sillage de la
cour austro-hongroise, les dorures du café Sacher que fréquentait la bonne
société viennoise à la fin du 19ème siècle et que notre époque,
nostalgique, a mythifié. De passage à Vienne, je n’ai pas résisté à goûter cet
emblème national autrichien. La Sacher Torte est bonne, indéniablement,
mais pas exceptionnelle, n’en déplaisent aux puristes. J’ai surtout savouré les
délices d’un cadre au charme suranné et cossu, j’ai tenu sur la pointe de ma
fourchette un morceau de l’éclat du règne des Habsbourg.
Et
la renommée des livres alors ? La notoriété d’un auteur ? Les ingrédients
du succès auraient-ils quelque chose à voir également avec la cuisine ? Vaste
sujet !