Dimanche
1er juin, j’ai la chance et la joie de participer à la clôture du
Festival du Rayon Vers, festival de poésie de la région Hauts-de-France, dont
les premières pousses et boutures sont à l’initiative des Éditions La Chouette
Imprévue. Ce festival, durant tout le printemps, met à l’honneur la poésie par
des lectures et spectacles ; tisse des liens entre des poètes français et
belges (proximité géographique et linguistique) et les auditeurs, propose des
ateliers d’écriture poétique. Grande première cette année, le musée de Picardie,
à Amiens, nous ouvre ses portes pour une déambulation entre les œuvres au fil
des vers. J’y lirai, l’après-midi, des extraits de L’Engrangeoir mais également
d’autres poèmes. Pour l’occasion, j’avais taquiné la muse en musardant dans le
musée et mon coup de cœur s’était porté sur un tableau d’Albert Maignan, La
Muse verte. Muse séductrice et dévorante puisqu’il s’agit ici de l’absinthe,
boisson appréciée des artistes du 19ème siècle mais qui, chez moi, n’a
connu que le bout de mon crayon et pas trempé dans mon verre ! Or, hasard
du calendrier, le musée prépare une exposition rétrospective sur l’œuvre du
peintre Albert Maignan et ma Muse verte a donc pris la poudre d’escampette !
À défaut de pouvoir lire mon poème devant la demoiselle, le voici présenté à la
Datcha.
La Muse verte (1895) Albert Maignan, musée de Picardie
Je suis ta fuite
Ton orgueil
Ta solitude
Quand tu chavires
Vaisseau amer homme
défait
Renversé par la lame de
tes échecs
Je suis naïade
Je t’ensorcelle, je
t’aspire, je t’étreins
Vouivre verte dans ton
verre
Je te cède l’insaisissable
ivresse
Te murmure des songes
Qui cognent
Je t’efface des horloges
Je suis ton exil des
places habitées
Je suis ta douleur
d’amour perdu
Je t’embrasse et te
caresse
Je serpente en toi
Femme venin
Je me repais de ton
abandon
Tu cherches les mots
Tu bâtis des chimères
Qui n’ont point loi de
vers
Poète désarmé
Tu ris quand tu voudrais
pleurer
Dans le ressac des
illusions
Tu crois saisir ton
destin
Et me résister
Mais je te voile les yeux
Écharpe d’organdi
Légère mais point volage
Et muse fidèle toujours
je reste à tes côtés.
Nathalie
Boniface-Mercier
10 mai 2025