Crèche italienne Rome Hiver 2023-2024
Il y a une dizaine de
jours, la crèche du marché de noël de ma ville a été saccagée, la figurine de l’Enfant
Jésus a été décapitée. Les vandales ont, semble-t-il, été identifiés grâce aux
caméras de surveillance du site. La crèche, à l’initiative de l’association des
commerçants, est en effet installée au cœur des chalets d’exposition de
produits, avec le portail de la Vierge dorée de la cathédrale en arrière-plan. Immuable
symbole de la Nativité, humble et discret dans cette effervescence commerciale,
la crèche, qu’elle soit dans une église, dans l’intimité d’un foyer, dans le
hall d’une école catholique, sur la place publique, en France ou ailleurs dans
le monde, rappelle qu’elle est la raison d’être de la fête de Noël. La vague
d’indignation et de désarroi véhiculée par les réseaux sociaux à l’annonce de
cet acte infâme montre à quel point de nombreuses personnes – loin d’être catholiques
pratiquantes pour la plupart – vouent un affectueux respect à ces scènes de la
Nativité au nom de la tradition. C’est que l’Enfant Jésus dans sa mangeoire
devant l’âne et le bœuf n’illustre pas un quelconque gentil récit pour les
enfants.
La crèche, bien sûr, ramène beaucoup d’adultes
à leur enfance, à la magie de Noël, aux cadeaux et douceurs. Elle est l’histoire
qui a bercé des générations d’enfants avec des sujets miniatures en bois ou terre
cuite que l’on manipule avec délicatesse, avec une odeur de paille que chauffe
parfois un lumignon fiché au-dessus de la mangeoire. Elle est un catéchisme simple
et concret, à hauteur d’enfant, dans les foyers où l’on prie au quotidien comme
dans les familles où l’on invite Dieu chez soi au moins une fois par an, au nom
de la tradition et d’un reliquat d’éducation religieuse qu’on n’a pas renié totalement.
C’est pourquoi la crèche est
universelle et intemporelle, cyclique et toujours nouvelle dans le temps
liturgique. Elle est le message absolu de l’Amour et de l’Espérance, de de la
paix, de la compassion, de la douceur, de l’humilité, de la patience également.
Elle a la figure de l’amour des parents pour leurs enfants. Elle est aussi
celle de la pauvreté chassée ou ignorée des puissants. La crèche est un temps
suspendu dans un monde mouvant, incertain, incohérent et souvent violent. Simple
bergerie ou grotte naturelle, elle est le point de convergence de peuples qui
se mettent en marche pour aller à la rencontre du Fils de l'Homme, Sauveur du
monde, peuples de tous horizons qu’ont d’abord incarné les Rois Mages et derrière
lesquels cheminent, chaque noël, des millions de chrétiens.
Enfin, la crèche – je devrais dire les
crèches – est un artisanat, une expression concrète de la foi : crèches vivantes
à la manière de celle de Saint François d’Assise, crèches provençales et leurs
santons qui composent tout un village avec leur meunier, le joueur de galoubet,
la lavandière, la tisserande et le maréchal-ferrant, crèches napolitaines avec
leurs cabarets et joueurs de cartes, crèches en feuilles de maïs tressé, en céramique,
en bois sculpté, en crochet, en plâtre colorié, crèches bricolées à la maison
avec quelques écorces d’arbre ou du papier rocher, crèches de Playmobil. Les
crèches, par leur diversité, vivent avec les hommes et leur temps, avec leurs
talents, avec l’indigence ou l’opulence des matériaux qui leur sont disponibles.
Mais quelle que soit sa forme, sa taille, sa mise en scène, la crèche est UNE. Elle
est ce fait inouï de Dieu fait homme dans ce qu’il a de plus vulnérable, un bébé,
et de plus inébranlable, l’Amour.
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